La Chine surveille l’élection américaine avidement mais sans envie

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Les deux plus grandes économies mondiales actuelles choisissent leurs dirigeants début novembre, un accident d’agenda qui va mettre en exergue la différence entre l’élection opaque chinoise et la démocratie américaine.

Photo: des figurines en sucre du Président américain Obama, au milieu de célébrités asiatiques à Jilin, dans le Nord Est de la Chine (AFP).

HONG KONG 香港 (Avec Agences) – Le rythme de l’élection présidentielle américaine a été donné par trois débats télévisés regardés par des millions d’électeurs, alors que les candidats ont aussi parcouru tout le pays dans des meetings politiques effrénés, où ils ont pu rencontrer des milliers de supporters. De l’autre côté du Pacifique, l’élection chinoise va se tenir à huis clos, dans les discussions feutrées entre membres du Parti Communiste qui désigneront leur nouveau leader pour dix années (2 mandats de cinq ans). L’élection américaine se tiendra le 6 novembre, le congrès spécial du Parti Communiste commencera le 8 novembre.

Si le gagnant de l’élection américaine est encore difficile à prévoir, étant donné que Barack Obama, le Président sortant, est au coude-à-coude dans les sondages avec son concurrent républicain, Mitt Romney, en Chine, il est presque certain que le nouveau Président, sera Xi Jinping (习近平), actuel vice-Président. Sur le campus de Beida, l’Université de Pékin, les étudiants chinois regardent fébrilement les élections en cours à Washington, qui semblent plus intéressantes que la transition en cours à Pékin.

Pour la télévision d’état (CCTV 中国中央电视台), même son de cloche, l’élection américaine prend beaucoup plus de place à l’antenne que le 18è Congrès du Parti. Les sites web comme IFeng, proposent même des directs des débats, et demandent aux internautes ce qu’ils pensent des candidats américains et pour qui ils aimeraient voter. « Copier de façon mécanique la démocratie américaine causerait de nombreux problèmes en Chine, même s’il nous faudra passer par là pour progresser », estime ainsi Zheng Kailun, 24 ans.

Lors du deuxième débat présidentiel américain à l’université d’Hofstra (Long Island), les candidats étaient libres d’aller et venir sur une petite scène, face au public posant les questions. Peu après, lors d’un dîner de gala à New York, Mitt Romney et Barack Obama ont amusé la galerie à coups de piques ironiques et d’auto-dérision.

Inimaginable en Chine, où les dignitaires semblent figés dans une posture hiératique, censée incarner la solennité de leur fonction. « Obama est bon dans la performance devant le public, il a une personnalité irrésistible », juge Tu Zongchi, un étudiant en relations internationales. Mais lui aussi pense que le système électoral américain est « inapplicable à l’heure actuelle en Chine ».

La semaine dernière, un article du New York Times, a indiqué que la fortune de la famille du Premier Ministre Wen Jiabao (温家宝) atteignait 2,7 milliards US$, une information rapidement attaquée par Pékin, qui a hurlé à la manipulation politique, et a bloqué le site d’information. Zhang Shuo, étudiant en ingénierie mécanique, déclare pour sa part qu’il suit avec passion les élections américaines, en déclarant que le système chinois est adapté à la société chinoise. « Peut-être que dans 30 ou 50 ans nous aurons le même niveau de démocratie que les Etats-Unis, c’est une évolution ».

Les vues des étudiants selon lesquelles les réformes politiques vont évoluer doucement sont en contraste total avec les demandes démocratiques des étudiants des années 80 qui avaient grondé jusqu’en juin 1989 sur la Place Tiananmen (天安門廣場). Les fruits de l’ouverture économique de la Chine semble avoir apaisé ces nouveaux étudiants qui préfèrent profiter de la croissance, plutôt que de se préoccuper de problèmes politiques.

Du côté du pouvoir communiste, la priorité est de maintenir la stabilité de la relation avec Washington, afin de poursuivre sans accrocs le développement économique chinois. Pékin avait exactement la même position il y a quatre ans, quand Barack Obama affrontait John McCain. « La poursuite de relations stables et solides entre Pékin et Washington sert les intérêts fondamentaux des deux pays », a déclaré la semaine dernière Hong Lei, porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères.

Cependant, une victoire de Romney pourrait avoir un impact immédiat sur les relations avec Pékin, car le candidat républicain a déclaré qu’il dénoncerait directement, et dès ses premiers jours en fonction, la manipulation économique de la Chine sur les marchés. Mitt Romney serait d’ailleurs favorable à des sanctions économiques envers la Chine, et des taxes importantes sur les produits importés de l’Empire du Milieu. Les médias chinois demandaient d’ailleurs récemment à leurs lecteurs de prendre avec précautions ces idées de Romney: « qu’on le veuille ou non, démocrate ou républicain, le prochain Président américain devra adopter une posture plus offensive envers la Chine, c’est ce que l’électorat américain veut, qu’il vote pour Obama ou Romney », déclarait semaine dernière l’Agence officielle Xinhua •

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